Le narrateur de ce court roman est un jeune homme vivant dans une cité, d'une banlieue comme il y en a tant en France, botaniste amateur et poète rêveur. Il a sa famille, il a ses copains, et cette fille qu'il rencontre dans une soirée et dont il tombe immédiatement amoureux. Sauf que... d'origine immigrée d'une ancienne colonie française, comme tous ses potes et voisins de la cité, il est tous les jours confrontés aux contrôles abusifs, provocations et violences policières. Fait avec lequel ils apprennent à vivre, parce que pas le choix, jusqu'au jour où l'inéluctable arrive, et alors... deux secondes d'air vont brûler, une beauté destructrice, sans haine ni violence, mais nécessité d'expression et de libération d'un chagrin trop grand.
Deux secondes d'air qui brûle est paru un an avant la mort de Nahel, mais c'est depuis des décennies que des jeunes hommes (et femmes) sont tués par des tirs de la police, dans l'ignorance, et souvent l'indifférence la plus totale, des médias et de la société française. Toutefois, dans son premier roman, même si Diaty Diallo parle de -- et dénonce -- les violences policières, le récit s'attache plutôt à ces personnalités diverses et magnifiques des habitants de la cité, avec leur débrouillardise, leurs talents, leurs espoirs, leurs peines, leurs hésitations, leurs contradictions et leur détermination. En moins de 200 pages, l'autrice nous peint des portraits à l'opposé de l'image plate et uniformisée que la société française se fait du "jeune de banlieue", terme réducteur et dégradant pour désigner des personnes aussi singulières qu'il y a d'individus. Pour ne rien gâcher, l'écriture mêlant oralité, poésie et passages hautement littéraires délecte les yeux et les oreilles.
Une petite merveille à ne pas manquer, pour s'ouvrir, s'insurger et rêver.