Si la fantasy peut trop simplement se résumer au Seigneur des Anneaux de Tolkien, à Conan de Robert E.Howard, ou Game of Thrones de Georges R. R. Martin, il existe heureusement bien d’autres œuvres qui valent le détour, bien d’autres voix d’autrices qui ont fait évoluer la fantasy au delà de son carcan souvent trop stéréotypé. Parmi elles, on pense à Ursula Le Guin, mais aussi à Robin Hobb avec sa série culte de l'Assassin royal.
Publié entre 1996 et 2018, Le Royaume des Anciens, c'est cinq ensembles qui se coordonnent d'une manière vraiment originale. Tous les cycles de Robin Hobb se situent dans le même monde, à différents endroits de la carte. C'est un ensemble de trilogies avec une tétralogie mais chacune peut être lue, les deux premières du moins, de manière indépendante et complètement satisfaisante.
Le cycle principal narre l'histoire de Fitz Chevalerie, jeune homme qui découvre qu'il est le bâtard non reconnu du prince héritier du royaume des Six-Duchés. Dès son jeune âge, il est formé à devenir l'assassin de la famille et est catapulté malgré lui dans les coulisses du pouvoir. On va suivre ses aventures ainsi que son amitié avec le Fou, sorte de prophète à la personnalité fantasque et insaisissable. Le tout est saupoudré de dragons et de magies anciennes : l'Art, sorte de magie télépathique, et le Vif, qui permet de se lier aux animaux.
Hobb a grandement contribué à déconstruire la fantaisie traditionnelle en y apportant une dose de sensibilité dans ses personnages et en laissant plus de place à des protagonistes féminins, non-binaires, racisés, renforçant la cohérence géographique et scénaristique de cet immense continent. C'est le coup de génie de l'écrivaine que d'avoir commencé sur un canevas de fantasy stéréotypée, autour de la quête initiatique d'un personnage masculin (le fameux "élu") pour le faire progressivement évoluer vers un récit plus universel. Au bout des cinq cycles, tout est bien ficelé et s’imbrique parfaitement : preuve d'un travail d'écriture virtuose sur plus de 20 ans !